Nouvelle censure de la pratique du "pastillage" des EBC dans les PLU (TA Versailles, 3 déc. 2024, n°2104228)
- Marc Pitti-Ferrandi
- 6 févr.
- 2 min de lecture

Par un jugement du 3 décembre 2024, le tribunal administratif de Versailles a annulé des dispositions du plan local d’urbanisme (PLU) de Jouars-Pontchartrain en raison du « pastillage » d’un espace boisé classé (EBC), une pratique consistant à retirer arbitrairement des petites parties d’un bois (les « pastilles ») de la protection EBC afin d’y autoriser les constructions.
Saisi par plusieurs associations de protection de l’environnement assistées de notre cabinet, le tribunal a confirmé le caractère illégal de cette technique injustifiée et arbitraire.
Le cas du Bois de Barre : un bois ancien artificiellement "mité"
L’affaire concernait des pastilles appartenant au Bois de Barre, dont le boisement est attesté depuis des décennies par les photographies aériennes de l’IGN (1950-1965) et les images satellites les plus anciennes disponibles (2003).
Or, lors de l’adoption du PLU en 2012, la commune avait créé des pastilles constructibles permettant à 10% de deux terrains boisés classés EBC.
Interrogée, l’ancienne maire avait justifié cette décision en expliquant qu’il s’agissait d’« éviter une discrimination envers le propriétaire » puisque le bois serait déjà mité. Le tribunal a jugé qu’un tel motif était dénué de valeur juridique et ne pouvait justifier la suppression d’une protection légale.
Le rappel du droit : protéger les espaces boisés classés
Le tribunal a rappelé les dispositions de l’article L. 113-1 du Code de l’urbanisme aux termes duquel :
« Les PLU peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer (…) ».
Il a ensuite rappeler que l’article L. 113-2 du même code :
« Le classement interdit tout changement d’affectation ou tout mode d’occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements ».
En conséquence, les permis de construire autorisés sur cette parcelle, impliquant la coupe d’arbres et l’implantation d’une maison individuelle, méconnaissaient directement ces dispositions.
Une jurisprudence constante contre le « pastillage »
Cette décision s’inscrit dans une jurisprudence désormais constante : le « pastillage » des EBC est illégal car il compromet l’intégrité des boisements et ouvre la porte à une urbanisation diffuse dans des espaces protégés.
Le jugement du 3 décembre 2024 :
confirme que le Bois de Barre doit rester intégralement protégé ;
rappelle que les quelques pavillons épars ne sauraient suffire à qualifier le site de zone urbaine ;
écarte définitivement la justification « politique » ou « d’équité » invoquée pour déclasser des portions de bois.
Une victoire pour la protection des boisements et contre le mitage forestier
Pour les associations requérantes, ce jugement est une victoire essentielle pour la protection des forêts périurbaines, menacées par une urbanisation insidieuse.
Il démontre que la justice peut stopper les tentatives de contournement des protections légales par des techniques de zonage abusives, et véhicule un message clair : les forêts urbaines et périurbaines doivent être intégralement protégées, sans compromission ni passe-droit.
Commentaires