Référé expertise : la preuve d’une zone humide et d’espèces protégées arrachée par les associations
- Marc Pitti-Ferrandi
- 20 juin
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 12 sept.

Face aux dénégations persistantes d’un promoteur, deux associations environnementales ont eu le courage de recourir à la procédure de référé expertise. Leur persévérance vient d’être récompensée : l’expert désigné par le tribunal administratif a confirmé, dans un rapport rendu le 16 mai 2025, la présence d’une zone humide et de nombreuses espèces protégées, dont la salamandre tachetée.
Une victoire qui démontre à quel point le référé expertise peut être une arme décisive pour établir la vérité écologique, face à des projets immobiliers qui cherchent parfois à masquer leurs impacts réels.
Un projet immobilier contesté… et un promoteur dans le déni
Un permis de construire autorisant la réalisation de 25 logements et d’un parking souterrain avait été délivré en 2019 sur un terrain de plus de 3 000 m² à L’Étang-la-Ville. Dès le départ, des lanceurs d’alerte avaient signalé que le site accueillait :
un ru en limite sud,
des zones humides fonctionnelles,
et plusieurs espèces protégées, dont la salamandre tachetée.
Mais le promoteur a nié ces réalités jusqu’au bout. Il a même produit une « expertise » privée concluant à tort à l’absence de zone humide et d’espèces protégées, tentant ainsi d’échapper à toute obligation d’autorisation environnementale.
Le choix stratégique du référé expertise
Face à ce déni, les associations ont saisi le juge des référés (article R.532-1 du CJA) afin d’obtenir une expertise judiciaire indépendante. L’expert a été chargé de :
constater les caractéristiques écologiques du terrain,
rechercher la présence d’espèces protégées,
et déterminer si le site relevait du régime des zones humides au sens du Code de l’environnement.
Malgré les pressions, les manœuvres dilatoires et même des travaux de débroussaillage réalisés en pleine période de reproduction des salamandres tachetées (en violation des instructions de l’expert), la mission est allée à son terme.
Une plainte pénale est en cours d'examen par le parquet à la suite de la découverte d'une salamandre tachetée morte en bordure du terrain privé juste après le débroussaillage du terrain.
Le rapport d’expertise : une démonstration accablante
Après une étude faune-flore quatre saisons et de nombreux relevés de terrain, l’expert conclut :
à l’existence d’une zone humide impactée par le projet immobilier,
à la présence de nombreuses espèces protégées, et en particulier de la salamandre tachetée sur l'ensemble du terrain,
à un impact fort du projet sur la biodiversité, avec destruction d’habitats, dérangement d’espèces et risques accrus pour la faune.
Ce rapport balaie définitivement les affirmations mensongères du promoteur, qui a été contraint pour la première fois de reconnaître la réalité de la zone humide et des espèces protégées.
Une victoire arrachée par la mobilisation associative
Sans le courage des associations, rien n’aurait été établi. Elles ont dû :
résister aux dénégations du promoteur,
avancer 10 000 € de frais d’expertise malgré des moyens très limités,
et documenter inlassablement la réalité écologique du terrain.
Leur persévérance a permis de mettre au jour des faits incontestables et d’imposer la prise en compte des enjeux environnementaux dans un projet qui, sans elles, aurait détruit silencieusement des espèces protégées et leur habitat.
Le référé expertise, un outil décisif pour défendre l’environnement
Cette affaire illustre tout l’intérêt du référé expertise en matière environnementale :
il permet d’obtenir rapidement une expertise indépendante,
il sécurise la preuve scientifique face aux dénégations des promoteurs,
il renforce la légitimité des recours contentieux,
et il peut conduire à une réorientation complète des projets.
Cette victoire est double :
elle met en lumière l’importance des zones humides et des espèces protégées pour l’équilibre écologique local ;
elle démontre que la justice et la science peuvent faire barrage à la mauvaise foi quand des citoyens s’organisent et refusent de céder.
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