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Annulation de la ZAC Boréalia 2 à Amiens pour insuffisance de l’étude d’impact (TA Amiens, 03.04.2025, n°2202837)

  • Photo du rédacteur: Marc Pitti-Ferrandi
    Marc Pitti-Ferrandi
  • 3 avr.
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 11 sept.

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Par un jugement en date du 3 avril 2025, le Tribunal administratif d’Amiens a annulé la délibération du conseil de la communauté d’agglomération Amiens Métropole qui créait une zone d’aménagement concerté (ZAC) pour transformer 62 hectares de terres agricoles en zone d'activités économiques et industrielles.

 

Cette annulation, obtenue à l’initiative de l’association Préservons l’avenir des terres amiénoises pour tou.te.s (PATAT), assistée du cabinet TerraNostra Avocats, consacre une victoire juridique et citoyenne contre un projet jugé incompatible avec les impératifs environnementaux et sanitaires.


Une étude d’impact environnemental gravement lacunaire


Le Tribunal a jugé que l’étude d’impact jointe au dossier de création de ZAC présentait des insuffisances majeures faisant obstacle à la mise en place de mesures d’évitement, de réduction et de compensation des incidences environnementales de ce projet.

 

Les insuffisances retenues par le Tribunal ont trait à des enjeux fondamentaux du projet, et avaient toutes été relevées par la MRAe dans son avis :

 

  • Eaux souterraines et eau potable : aucune analyse sérieuse de l’impact du projet sur le captage de Pont-de-Metz, qui alimente 25 % de la métropole en eau potable.

 

  • Risque inondation : absence totale de mesures pour anticiper un risque pourtant qualifié de « fort » (ruissellement, submersion, remontée de nappes) ;


  • Justification du choix du site : aucun bilan précis et cartographie des disponibilités foncières n’est présenté afin de justifier le choix du site d’implantation de la ZAC. L’étude d’impact ne permet ainsi pas de connaître, en violation du 7° de l’article R. 122-5 du code de l’environnement, les raisons pour lesquelles, eu égard aux effets sur l'environnement ou la santé humaine, le site d’implantation du projet en litige a été retenu, parmi les autres disponibilités foncières recensées sur le territoire de la communauté d’agglomération.

 

  • Emission de gaz à effet de serre : aucune « description des impacts du projet sur les émissions de gaz à effet de serre et des mesures d’évitement, de compensation et de réduction de ces impacts ».

 

  • Qualité de l’air : aucune évaluation sérieuse, alors même que le trafic routier et les activités économiques projetées risquent de dégrader durablement l’air ambiant. Le Tribunal rappelle qu’il ressort du 8° du II l’article R. 122-5 du code de l’environnement que c’est au stade du dossier de création de la ZAC que doit être décrit précisément l’effet du projet sur la qualité de l’air, facteur susceptible d'être affecté de manière notable par le projet, et les mesures d’évitement, de réduction et de compensation afin d’évaluer la faisabilité de l’opération d’aménagement litigieuse. Le maître d’ouvrage ne peut se borner à renvoyer à des études et modélisation ultérieures.

 

  • Biodiversité et chiroptères : état initial lacunaire alors que des espèces protégées sont présentes sur le site. Le volet faune flore de l’étude d’impact est jugé insuffisant dès lors que l’unique prospection réalisée à duré trois heures, à une période non propice à l’activité des chiroptères, et que le passage complémentaire réalisé ensuite a révélé la présence d’espèces à enjeux. L’état initial est ainsi jugé non proportionné à la sensibilité de la zone, et les mesures proposées, insuffisantes.

 

Au vu du nombre d’insuffisances relevées dans l’étude d’impact, et de leur influence sur la faisabilité même de l’opération, le Tribunal a jugé que la décision de création de la ZAC doit être annulée.

 

Une victoire pour l’environnement, l’eau et les terres agricoles


Le signal est clair. La création d’une ZAC délimite l’implantation de la zone. L’approbation de la délibération de création a des effets concrets : on sait que le terrain sera artificialisé et imperméabilisé. Quand bien même on ne connaît pas encore précisément les projets qui y seront implantés.

 

L’étude d’impact du dossier de création de ZAC doit donc analyser toutes les conséquences de ces effets, afin qu’il soit possible de vérifier que le site, au regard de sa sensibilité environnementale, est approprié pour accueillir une ZAC, et que soient prévus d’ores et déjà des mesures générales d’évitement, réduction et compensation.

 

En l’espèce, le maître d’ouvrage n’a pas tenu compte des réserves exprimées par la MRAe dans son avis sur la suffisance du dossier. La sanction est forte : la délibération est annulée.


Cette annulation est une victoire majeure pour la protection de l'environnement :


  • Elle protège un captage d’eau stratégique pour l’ensemble de la population amiénoise.

  • Elle sauvegarde des terres agricoles communales, essentielles pour une alimentation locale et durable.

  • Elle évite l’artificialisation injustifiée de 62 hectares, contraire aux objectifs de Zéro Artificialisation Nette (ZAN).

  • Elle met en lumière les risques sanitaires et climatiques : pollution de l’air, augmentation des gaz à effet de serre, destruction de la biodiversité.


La lutte est loin d’être achevée. La Métropole a deux mois pour faire appel et la commune d’Amiens vient parallèlement de modifier son plan local d’urbanisme (PLU) afin de permettre l’implantation, sur le site même de la ZAC annulée, d’une à deux gigafactorys.


Nous avons donc déféré cette modification du PLU à la censure du tribunal administratif d’Amiens. Le combat judiciaire et citoyen s’annonce encore long, face à un projet politique irresponsable et d’un autre temps, sacrifiant nos terres agricoles, notre eau et notre climat pour satisfaire des intérêts économiques et non les besoins de la population.


 

Lien vers la décision :


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